Comment une équipe de santé de Calgary a aidé à enrayer une éclosion dans une usine de conditionnement de la viande

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by Personnel de la Fondation AMC

En avril 2020, une usine de conditionnement de la viande de High River, en Alberta, est devenue le point chaud de la COVID-19 au Canada. Au total, 1 560 cas, dont 936 employés, ont été liés à cette usine devenue le site de la plus importante éclosion dans un même établissement en Amérique du Nord.

Bon nombre des quelque 1 700 personnes travaillant à l’usine étaient des réfugiés, des immigrants nouvellement arrivés et des travailleurs étrangers temporaires qui, en plus de devoir se soigner, se sont heurtés à des barrières linguistiques et à des difficultés d’accès aux soins de santé.

« Lorsque le nombre de cas est soudainement passé à 1 000, explique la Dre Annalee Coakley, médecin de famille et directrice médicale de la Mosaic Refugee Health Clinic de Calgary, il est devenu évident que la situation empirait et que les gens avaient du mal à respecter les interventions de santé publique. »

Les défis à relever pour contenir le virus se situaient aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’usine de transformation.

La Dre Coakley précise que, dans l’usine, il était difficile pour les travailleurs et les travailleuses de maintenir la distanciation physique. Parallèlement, l’équipement de protection individuelle (EPI) devenait rapidement humide, ce qui compromettait son efficacité.

« Même en faisant tout ce qu’il faut, le virus reste transmissible. » – Dre Annalee Coakley

À l’extérieur de l’usine, les travailleurs atteints de la COVID-19 avaient souvent du mal à s’isoler pour diverses raisons liées à leurs conditions de vie, comme la cohabitation dans des résidences multigénérationnelles ou des logements avec cuisines et salle de bains communes.

« La plupart des travailleurs ne pouvaient pas compter sur le même tissu social que des personnes ayant vécu toute leur vie à Calgary, indique la Dre Coakley. On ne peut pas dire aux gens de rester chez eux pendant 14 jours sans leur fournir de quoi manger et un soutien au revenu. »

De plus, ces travailleurs et travailleuses étaient soumis à de la discrimination au sein de la communauté, ce qui compliquait pour eux l’accès au dépistage de la COVID-19 et aux soins.

« Certains de mes patients ont été évincés de leur domicile parce qu’ils travaillaient à l’usine », ajoute la Dre Coakley.

Agir sur les déterminants sociaux de la santé pour prévenir la transmission de la COVID-19

L’éclosion est devenue un exemple frappant de l’influence des facteurs socio-économiques sur la propagation de la COVID-19. Elle a incité la Dre Coakley à mettre sur pied une équipe collaborative composée de médecins de famille, d’autres professionnels de la santé et, surtout, de représentants des patients entretenant des liens personnels et culturels avec les travailleurs et travailleuses de High River.

La Fondation AMC a octroyé cinq millions de dollars au Programme de subventions pour contrer les impacts de la pandémie de COVID-19 (SCI-COVID) de la Fondation pour l’avancement de la médecine familiale (FAMF). Ce programme aide les médecins de famille à repenser la prestation de soins durant la pandémie.

Le projet de la Dre Coakley, intitulé COVID-19 Response and Impact Group for Quality Improvement, a contribué à évaluer un parcours clinique amélioré pour mettre en relation les travailleurs de l’usine avec des organismes sociaux offrant des services comme le dépistage de la COVID-19, des soins de santé, de l’aide au logement et un soutien alimentaire. Lorsqu’un travailleur était malade et isolé, un médecin de famille lui parlait tous les jours pour évaluer son état de santé et son bien-être social. 

« Si les travailleurs n’avaient pas de médecin de famille, poursuit la Dre Coakley, on leur en trouvait un. »

Dans le cadre du programme, son équipe a organisé de nombreuses assemblées publiques pour discuter de prévention de la COVID-19, de dépistage et d’accès aux mesures d’aide sociale. L’établissement d’un climat de confiance avec la communauté a encouragé les travailleurs et les travailleuses à se faire soigner, ce qui a permis, au bout du compte, de contrôler l’éclosion. Le travail de l’équipe a également mené à la mise en place de cliniques de vaccination sur place dans les usines de conditionnement de la viande en Alberta.

« Pour beaucoup de nos patients dans les usines, signale la Dre Coakley, il était également difficile d’utiliser l’outil de prise de rendez-vous pour un vaccin à cause des barrières linguistiques et des lacunes en matière d’habileté numérique. C’est pourquoi nous avons proposé d’amener la clinique de vaccination vers eux. »

Pendant deux semaines au printemps, toutes les usines de conditionnement de la viande de la région de Calgary ont organisé des cliniques de vaccination sur place, ce qui a permis à 3 043 des 3 740 travailleurs de recevoir leur première dose, soit un taux de vaccination de 81 % – supérieur à celui de l’ensemble de la population de l’Alberta à ce moment-là.

Selon la Dre Coakley, c’était une étape importante pour une communauté aux prises avec une grave éclosion tout juste un an avant.

« La subvention est directement liée au programme d’immunisation que nous menons, conclut-elle. Elle a donné lieu à tous ces autres projets. »